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COVID 19 : UNE COALITION INEDITE SAISIT LE CONSEIL D'ÉTAT

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Act-Up Paris
ADELICO
Collectif Inter-Hôpitaux
Collectif Inter-Urgences
Syndicat CNI - Coordination nationale infirmière / interprofessionnelle
Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament
Communiqué de presse — Lundi 30 mars 2020
COVID 19 : UNE COALITION INEDITE SAISIT LE CONSEIL D'ÉTAT POUR DEMANDER, AU NOM DU
DROIT A LA DIGNITE HUMAINE, DES REQUISITIONS NECESSAIRES FACE A LA PENURIE DE
MATERIEL ET DE MEDICAMENTS
Le matériel essentiel manque aujourd'hui pour lutter contre le COVID-19 : masques, tests, équipements,
médicaments essentiels pour assurer la prise en charge des personnes malades, y compris des
médicaments de réanimation et de soins palliatifs nécessaires pour assurer la dignité des personnes.
Nos organisations s'inquiètent de l'insuffisance des moyens disponibles sur le terrain malgré les mesures
prises et annoncées par le gouvernement. Si cette insuffisance se prolongeait, elle aggraverait la
catastrophe sanitaire en cours, en violation de plus en plus manifeste de la dignité des personnes.
Pour l'empêcher, nos organisations respectives1 ont décidé de s'associer pour former une coalition
inédite en déposant ce lundi 30 mars 2020 une requête en « référé mesures utiles » devant le Conseil
d'État.
A côté des mesures exceptionnelles de confinement et de privations de certaines libertés publiques ou
individuelles, il est indispensable de mettre en place des mesures pour que la production industrielle
s'adapte à la « guerre sanitaire » déclarée, et donne aux hôpitaux les moyens d'effectuer leurs missions
dans des conditions nécessaires en termes de sécurité pour les patients et les soignants.
Cette requête fait suite aux annonces du Premier ministre Édouard Philippe le samedi 28 mars.
Même s'il a reconnu les pénuries, le Premier ministre n'a pas semblé prendre la mesure des
conséquences dramatiques de l'épidémie sur le manque et les pénuries de ces équipements, matériels et
médicaments absolument essentiels pour faire face à l'urgence de la situation.
Cette requête a donc pour but de saisir le Conseil d'État sur la gravité de la situation sanitaire, ainsi que
sur les graves atteintes à la dignité des personnes et aux menaces sur leur santé, leur vie qui en
découlent.
Une situation dramatique
Depuis le début de l'épidémie, les masques sont en quantité insuffisante. Les recommandations
concernant leur utilisation pour les professionnels de santé varient au fil du temps, s'adaptant à la pénurie et visant à limiter leur utilisation, avec une mise en danger inacceptable des personnels hospitaliers, notamment des salariés réquisitionnés.
Chaque jour, les témoignages continuent d'arriver sur les manques de masques, de blouses, de tests et même maintenant de sacs mortuaires avec une inquiétude qui grandit parmi le personnel hospitalier et un risque d'arrêt maladie qui augmente.
En outre, le personnel médical et paramédical restant une ressource très rare et particulièrement indispensable à la prise en charge des patients, il serait dramatique qu'elle vienne à manquer encore plus.
Il s'agit actuellement d'une préoccupation majeure pour les hôpitaux dans la mesure où les personnels étaient déjà en nombre insuffisant avant la crise, ce qui avait conduit à fermer de très nombreux lits, aujourd'hui rouverts en catastrophe devant l'urgence et la gravité de la situation. aux fermetures de lits.
Nous rappelons que c'est grâce à des annulations de congés et à des recrutements d'anciens personnels que des lits ont pu être rouverts et admettre les patients qui le nécessitaient.
Par ailleurs, les services hospitaliers sont aujourd'hui contraints d'utiliser « avec parcimonie » et « frugalité » certains médicaments tels que la morphine ou de rationner l'usage des curares.
Ils doivent « jongler » avec les stocks existants qui s'amenuisent, comme l'ont documenté des articles du Monde et de Mediapart la semaine dernière, avec à l'appui des compte rendus des agences régionales de santé et de la préfecture de police de Paris.
Cette situation dramatique est une atteinte à la sécurité sanitaire des personnes et à leur vie – pas d'intervention chirurgicale sans curare par exemple. C'est aussi une atteinte à leur dignité – notamment pour les personnes en fin de vie qui risquent de ne pas avoir accès à la sédation profonde et de mourir en souffrant, étouffées, angoissées, sans possibilité d'apaisement.
Cette situation renforce par ailleurs les vulnérabilités des personnes exclues et les inégalités.
Prendre les mesures de réquisitions nécessaires
La situation ne fera qu'empirer si les décisions nécessaires ne sont pas prises dès maintenant.
Le gouvernement qui a pourtant reconnu des difficultés majeures à venir, liées à la pénurie mondiale de ces médicaments, n'a semble-t-il pas encore envisagé des mesures fortes comme des réquisitions.
Pourtant, celles-ci pourraient sauver des vies si elles étaient prises aujourd'hui.
Face à cette pandémie sans précédent, et à l'urgence extrême de la situation (pic de l'épidémie en cours en France), il n'est pas possible de se contenter d'une réponse « proportionnée ».
La France dispose du savoir-faire, des infrastructures, capacités industrielles, notamment de production, pour mettre en place des mesures décisives maintenant. La production nationale de masques, de ventilateurs mécaniques et de matériels de réanimation comme des pousses seringues qui manquent pour prendre en charge les patients en réanimation et dans d'autres services de soins intensifs (y compris pour des patients non COVID) et pour accompagner les patients en fin de vie, permettrait de répondre à la demande qui ne cesse d'augmenter avec des stocks qui s'amenuisent chaque jour.
Les experts du marché de la matière première, comme le pharmacologue Andrew Hill, sont formels : la Chine et l'Inde ayant dû ralentir leur production et faisant face à une demande exponentielle pour les mêmes molécules, ils ne seront pas à même de fournir la demande et les pays ayant commandé devront trouver d'autres solutions.

Il est donc urgent de ne pas repousser des décisions qui sont nécessaires pour sauver des vies dès aujourd'hui. Les médicaments qui sont actuellement sous tension sont pour leur grande majorité dans le domaine public. Ils ne sont plus sous brevet, et la production de la matière première est possible en France.
La production nationale de ces médicaments et de leur matière première, permettra également d'aider nos voisins européens et des pays du Sud par la suite
Décider de programmer au niveau national de la production est le meilleur moyen d'éviter un rationnement des matériels médicaux et de protection et une rupture générale des médicaments indispensables à la prise en charge des patients. Ne pas répondre à la pénurie conduirait à de graves pertes de chance pour les patients et aboutirait à des choix de priorisation difficiles et questionnables d'un point de vue éthique.
Nous attendons de notre gouvernement qu'il mette tout en oeuvre pour protéger ses personnels hospitaliers indispensables à la gestion de la crise actuelle et qu'il leur donne les moyens d'assurer des soins en préservant la dignité des personnes.
Aujourd'hui, compte-tenu de l'extrême urgence de la situation, seules des actions fortes comme des réquisitions, prises sans tarder, pourraient permettre d'éviter un drame et un scandale sanitaire majeur à notre pays.
C'est la raison pour laquelle nous avons saisi en urgence le Conseil d'Etat afin qu'il décide des mesures nécessaires pour assurer la dignité des personnes et la sécurité sanitaire du pays.
En parallèle, il va de soi qu'une telle action devra être coordonnée à l'échelle européenne pour garantir la sécurité sanitaire de la population.
***
(1 Les requérants sont des personnes individuelles, ainsi que Act Up-Paris, ADELICO, le Collectif Inter-Hôpitaux, le Collectif Inter-Urgences, la
Coordination nationale des infirmières, l'Association des Victimes, Malades et Impactés du Corona Virus. L'Observatoire de la
transparence dans les politiques du médicament soutient la démarche.)

Contacts presse (merci d'indiquer un numéro de téléphone) :

  • Maître Jean-Baptiste SOUFRON (Avocat) : 06 48 74 15 10
  • M. Paul CASSIA (ADELICO) : 01 42 96 60 00
  • M. Patrick WEIL(ADELICO) : 01 42 96 60 00
  • Marc-Antoine BARTOLI (ACT-UP PARIS) : 06 34 45 68 89
  • Professeur André GRIMALDI (Collectif Inter-Hôpitaux) : 06 71 21 73 04
  • Docteur Sophie CROZIER (Collectif Inter-Hôpitaux ) : 06 03 55 28 08
  • Hugo HUON (Collectif Inter-Urgences) : 06 24 71 92 50
  • Céline LAVILLE (Coordination nationale des infirmières) : 06 64 41 78 65

Jérôme MARTIN (Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament) : 06 84 47 20 92

  • Pauline LONDEIX (Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament): 06 47 98 48 58
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