Interwiew Métronews de Nathalie Depoire Présidente de la CNI :
Une étude européenne révèle que la surcharge du personnel hospitalier influe sur la mortalité des patients à l'hôpital. Quelle est votre réaction ?
Ça ne me surprend pas du tout. Mon seul regret est qu'on n'ait pas ce genre d'étude en France. Ce qui est mis en avant ici fait partie de nos revendications, avoir des effectifs adaptés à nos besoins. On ne demande pas plus d'infirmiers juste pour avoir plus de monde. Nous demandons des effectifs adaptés à la spécificité de chaque service, afin de garantir la sécurité et la qualité des soins. En fait, on veut des ratios : pour telle spécialité, tel nombre d'infirmiers. Car un service de 30 lits peut être moins lourd en charge de travail qu'un service de 20 lits.
L'étude met aussi en avant le manque de formation du personnel infirmier. Êtes-vous d'accord ?
Le manque de personnel et le manque de formation sont deux choses très importantes en effet. Depuis 2009, le niveau licence est reconnu pour les infirmiers. Pour autant, il reste à construire, comme les autres pays européens le font déjà, une vraie formation, avec un système LMD complet (Licence Master Doctorat, ndlr). La France est très en retard sur ce point. Il faut construire une filière dédiée à l'université, et enclencher des processus de recherches. Il y a bien sûr les déclarations du Président lors du Plan Cancer III (dévoilé fin janvier, ndlr), dans lesquelles il annonce la création d'une formation d'infirmier clinicien. Elle existe déjà, en fait, mais il faut qu'elle soit reconnue et qu'elle entre dans un cadrage national. Ce qui n'est pas le cas aujourd’hui.
Manque de personnels, formation mal encadrée... Deux problématiques étroitement liées ?
Pour garantir la formation, il faut absolument garantir un nombre suffisant d'infirmiers. Or, on a des situations où certains services ont plus d'étudiants que d'infirmiers. Dans ces conditions, on ne peut pas les encadrer comme on le devrait, alors qu'on en a l'obligation, c'est dans notre décret de compétences. Mais cette mission n'est pas valorisée ni comptabilisée. Par ailleurs, dans un système qui privilégie la course à l'acte, on n'a pas forcément la disponibilité de les accompagner dans l'acquisition de leurs compétences. Ces situations mettent vraiment en danger la qualité, voire la sécurité des soins, et ça, c'est très grave.
Propos recueillis par Thomas Roure, Métronews